Image : Robert Smithson
Le déplacement sur un lieu d'étude, à l'origine de certains de mes projets, donne lieu à une base documentaire importante. Celle-ci est composée par de nombreuses images, dessins voir des prises sons ou vidéo ainsi que des écrits. Tout l'ouvrage a pour but d'épurer cette documentation. Parfois même il faut flouter les documents, réduire leur lisibilité si l'objectif est de réaliser un « document en puissance »* qui ne révèle son potentiel que par la présence physique dans le lieu étudié. Présence motivée par le document lui-même qui dans ce cas-là est volontairement incomplet. L'épuration permet aussi d'enlever un cumul d'images qui, à chaque image, brouille la précédente. Ainsi la documentation originelle, exhaustive, qui est avant tout un constat et une observation, est canalisée, filtrée, dans l'optique de transmettre ce qu'est véritablement ce lieu d'étude. Car enfin le lieu parle de lui-même mais avec peine et même s'il crie, il ne peut transmettre cette parole à distance, il s'agit donc d'être un interprète. C'est dans ce rôle qu'il y a la possibilité de passer à l'action avec une marge de création qu'est celle de l’interprète. Le musicien doit donner la parole à sa partition qui sera signée de son timbre, pour ma part j'ai pour but de donner la parole au réel. Celui-ci est aujourd'hui dans la confusion de la vitesse et de l'optique purement fonctionnaliste. Cela a coupé court aux temps d'observations actifs, seuls à nous donner une vue juste par l'impartialité qu'ils confient.
*À voir le travail de Lara el Marcegui et le concept de site/non site de Robert Smithson ou encore "Images malgrès tout" de G Didi Hubbermann